Meilleurs
souvenirs Louis G.
Je
vous écrirai plus longuement un de ces jours.
Le 25 août 1906
Cher
Louis,
Vos
petits mots me font plaisir. Ils me rappellent les moments heureux
que nous avons vécus tous ensemble au début de l'été à
Maljasset. Ce n'est pas si loin ! Savez-vous que mon père veut
me fiancer à un homme de S. ? Je ne peux pas l'accepter. Cela
rend la situation entre Léon et moi très compliquée. Nous en
souffrons énormément. Patience. J'espère que vous avez toujours
des amis à Maurin. Meilleurs souvenirs, Marie
Mademoiselle
Marie au V.
Ai
reçu de vos nouvelles. Merci. Le temps passe. Encore 6 jours à
passer ici. Le temps est beau mais froid. Nous avons vu la neige sur
les hauts sommets. Rien de bien intéressant à vous rajouter. Bon
souvenir. L.G.
Mademoiselle
Marie
Encore
1 jour d’exil. Départ demain ou jeudi au plus tard. Samedi soir au
Tholonet par Aix. Bon souvenir de Maurin et de Maljasset.
Bonjour
affectueux (le dernier d’ici) L.G.
Première
étape. Ce soir Veynes. Demain 10 h Aix et le Tholonet. Attends de
vous une longue lettre. Sincères amitiés. Bonjour affectueux. L.G.
Mademoiselle
Marie au V.
Me
voilà rendu au Tholonet. Le voyage s’est bien effectué. Je vous
écrirai plus longuement dans le courant de la semaine.
Affectueux
bonjour de la Provence. L.G.
Le 25 septembre, Le Vernet
Cher
Louis,
J'espère
que nos courriers ne vont pas se croiser. Voilà presque 15 jours que
vous êtes sur la route. Quel déménagement ! C'est un long
voyage avec tout votre matériel, les machines et quelques hommes, je
suppose. Comme vous changez de carrières plusieurs fois par an, vous
reviendrez à Maurin, après la fonte des neiges. N'est-ce pas ?
Vous me ferez le plaisir d'une visite à Costebelle ? Ce sera
mon prochain poste dans quelques jours. C'est aussi dans la Vallée
de l'Ubaye mais plus bas, au confluent de la Durance et de l'Ubaye.
C'est sur votre chemin !
Enfin,
vous êtes en Provence, au pays de Cézanne. Le soleil ne se cache
pas derrière les montagnes à 14 heures comme à Maurin. L'air y est
doux et le soir vous pouvez vous promener sur la place du village. Je
vous envie. A Costebelle, il fera moins froid qu'à Maljasset parce
que c'est moins haut mais rien à voir avec Le Tholonet. Je vais
m'installer pour l'année entière. Et peut-être plus longtemps, m'a
dit l'Inspecteur. Veuillez m'excuser si je n'écris pas
régulièrement. En ce moment, je prépare la rentrée des classes.
J'ai beaucoup de travail. Affectueuses amitiés. M.
Mademoiselle
Marie Costebelle….
Depuis
plus de 15 jours sans nouvelles. Le temps est assez long ainsi ?
La semaine prochaine, visite de l’Exposition Coloniale de
Marseille. Vous enverrai quelques vues. Je suis encore ici pour une
quinzaine. Que faites-vous là-haut ? Etes-vous mieux qu’à
Maurin ? Une réponse sous enveloppe serait la bienvenue. En
doutez-vous ? Vous aviez mon adresse. L.G. au Tholonet près
d'Aix en Provence
En
attendant, mon meilleur souvenir. LG.
Le
7 octobre 1906, Costebelle
Mon
cher Louis,
Comme
la solitude vous pèse. Ca me fait de la peine. Je veillerai à vous
écrire régulièrement. Notre rencontre à Maljasset a été un tel
plaisir que je ne l'oublierai jamais. En vagabondant ainsi de
carrière en carrière aux quatre coins de la France, il est
difficile de se faire de vrais amis ! Je comprends. C'est
provisoire, j'espère ? Un jour, vous vous installerez à Paris ou à
Toulouse.
Vous
évoquez dans chacune de vos lettres notre vie à Maljasset et notre
amitié joyeuse et insouciante. J'ai aimé cette période, aussi.
Nous formions un bon groupe. Les beaux soirs d'été, nous riions,
nous discutions, nous passions plus de temps au bord du torrent
emmitouflés dans nos couvertures que dans nos chambres. Le souvenir
de l'été 1906 restera à jamais magnifique. Il nous fera longtemps
chaud au coeur.
Je
serais heureuse de recevoir des cartes de l'Exposition Coloniale. Je
n'aurai pas l'occasion d'aller la visiter. Vous me raconterez ce que
vous avez vu ?
Ici,
je travaille et je vis dans une maison d'école nouvellement
construite. Ma sœur Mélanie habite avec moi pour quelque temps. La
salle de classe est au rez de chaussée et notre appartement, à
l'étage. Rien à voir avec l'école de Maljasset qui occupait le
rez-de-chaussée d'une maison privée. Les familles sont gentilles.
Je connais la plupart d'entre elles, puisque j'avais été en poste
dans la même école pour un remplacement avant mon année à
Maljasset.
Je
suis très accaparée par mon travail. Mais ce qui me préoccupe en
continu ces derniers mois, c'est la décision de mon père. Je ne
comprends pas toutes ses motivations. Comment un père peut-il forcer
sa fille à se marier à un homme qu'elle connaît à peine et qui
vit maintenant à des milliers de kilomètres d'elle ? Il existe
des traditions encore bien ancrées dans nos vallées alpines. Je les
respecte toutes, mais celle-ci est une entrave à MA liberté d'aimer
l'homme de mon choix. Et ce dilemme me mine le moral.
Avez-vous
déjà entendu des histoires comme celle-ci ?
Léon
est complètement découragé. Il ne comprend pas que je ne refuse
pas purement et simplement. Il me dit que, chez lui, les filles
choisissent leurs maris. Moi, je choisis Léon. Et en choisissant
Léon, je m'exclus de ma famille. Mon père me reniera. Comment
faire ?
Je
vous souhaite bonne chance pour vos chantiers. Ecrivez-moi. Je vous
écrirai aussi. Avec mes affectueuses pensées. Marie
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