Le dimanche 20 août 1905
La
distance, mot fatal !
Aimer, c’est mourir. Espérer, une vaine illusion. Mon cœur
palpite et tout ému, je crois à un songe parfois. Combien de fois
me dis-je si vous pourriez m’aimer ? Adieu, j’arrive de
Pontis et demain je partirai pour Barcelonnette. Amable
Au
V., le 25 août
Amable,
Vous
êtes un voyageur-né, toujours sur les routes ! Difficile à
suivre, parfois !
J'ai
surpris une conversation entre mes parents, il y a quelques jours,
nous concernant tous les deux. J'entendais nos prénoms. Avez-vous
une idée de ce qu'ils pouvaient dire à notre sujet ? Si vous
saviez quelque chose, j'aimerais que vous me le disiez.
J'ai
hâte de reprendre mon travail. Je vous indiquerai ma nouvelle
adresse prochainement. Vos cartes postales me plaisent. A bientôt.
Marie
PS :
J'aime beaucoup danser. Je rate rarement une bonne occasion !
Au
V., le 30 août
Monsieur,
Je
vous remercie pour la nouvelle série « Aubade espagnole ».
J'ai bien reçu les 5 cartes. Elles sont très pittoresques et très
aimables. Malheureusement, elles ne m'éclairent en rien sur la
conversation de mes parents. Avant votre départ au Mexique, (j'ai
bien compris, n'est-ce-pas ?), je voudrais en savoir plus. Lors de
votre rencontre avec mon père à Seyne, il y a peu, avez-vous
échangé un propos me concernant ?
Si
ce n'est rien d'important et si cela ne me regarde pas, veuillez
m'excuser de poser ces questions. Je n'en reparlerai plus. Mais si
cela me regarde, merci de me tenir au courant. Cette histoire, vous
le voyez bien, me contrarie. Elle occupe mon esprit et m'empêche de
dormir. Enfin, j'espère que ce n'est rien et que chacun reprendra
ses activités tranquillement. Bonne continuation. Mes amitiés. Marie
Le
5 septembre
Mademoiselle,
Je
suis en train de préparer mon départ et en même temps, je pense à
vous et à votre requête. J'ai passé deux mois en France sans voir
le temps passer, m'occupant de ma famille, de mes affaires et faisant
avec bonheur votre connaissance. Ce n'est pas mon fort d'écrire,
comme vous l'avez remarqué. Il m'est donc difficile d'exprimer ce
que je ressens et ce dont j'ai parlé avec votre père.
Je lui ai, tout simplement, demandé votre main. Je pars pendant six mois pour régler des affaires de succession concernant ma compagnie à Durango. Ces six mois suffiront à chacun d'entre nous pour mûrir notre nouvelle situation et notre décision. Ne vous doutiez-vous pas qu'il s'agissait de cela ? Il vous en parlera. Nous en reparlerons par écrit. Je constatais que nous nous accordions bien et que je vous faisais sourire. Pour ma part, je suis tombé sous le charme d'une belle jeune femme vive et bien élevée. Mon séjour fut trop court. J'aurais aimé vous voir plus souvent, mais malgré tout, j'ai appris à vous connaître. Des personnes de votre entourage, que j'ai rencontrées, m'ont dit le plus grand bien de vous. Je suis certain que je ne me trompe pas. Vous me plaisez beaucoup et je souhaiterais faire ma vie avec vous dans la vallée. Pendant mon voyage, vous ne pourrez pas m'écrire. Je vous enverrai mon adresse postale au Mexique dans un mois. Avec mes amitiés et mes meilleures salutations, Amable
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